vendredi 25 novembre 2016

De Fillon à Ben Salem, le combat du salafisme à Paris, Djakarta et Tunis


« L'Islam radical est en train de gangréner une partie de nos concitoyens musulmans. Je veux la clarification de nos relations avec l’Arabie saoudite et le Qatar qui abritent les penseurs de l’Islam radical... Depuis longtemps, je dis qu’il faut faire face au risque d’une guerre mondiale provoquée par le totalitarisme islamique. Ce totalitarisme est comparable au nazisme. Il étend son ombre sur des territoires de plus en plus vastes du Sud Est asiatique jusqu’à l’Afrique occidentale. » discours de François Fillon.

Il était prévisible que l'Islam soit au cœur des débats pour les présidentielles. Coupant l'herbe sous le pied du Front National, François Fillon a posé le problème de la contamination des musulmans de France par une idéologie fasciste pseudo religieuse universellement diffusée par l'Arabie Saoudite. Depuis vingt ans, les observateurs indépendants dénoncent ce danger enfin devenu une évidence pour tous: le prosélytisme des fondamentalistes wahhabites menace la paix dans le monde. L'Islam, seconde religion de France, première communauté musulmane de l'occident ne sera pas épargnée. Les signes précurseurs d'une tempête meurtrière se multiplient. En voici deux exemples l'un est aux antipodes, l'autre est à notre porte.

En Indonésie, la fragile démocratie est en voie d'éradication. Cet archipel de 17 mille îles est une mosaïque culturelle de 250 millions d'habitants où la liberté des six religions est garantie par la constitution. Mais les musulmans dominant à 87%, traditionnellement paisibles, sont méthodiquement influencés par les salafistes violents. D'années en années, l'intolérance est en train de contaminer la société. Principales cibles : les minorités chinoises et chrétiennes.
L'emblématique Gouverneur de Djakarta Basuki Tjahara Purnama  cumule ces deux handicaps. De surcroît, étant parvenu à remettre un semblant d'ordre et de justice dans cette métropole grouillante de 30 millions d'habitants, sa réélection en février prochain était jusqu'à présent donnée pour acquise. C'était sans compter avec les mafias islamo-fascistes qui ont réussi à le faire inculper de blasphème et lui interdire de quitter le territoire national. Le crime de cet homme que la rue surnomme familièrement Ahok, est d'avoir publiquement déclaré que rien dans le Coran n'interdisait à un musulman de voter pour un non musulman. Les obscurantistes ont crié au scandale. « Un musulman ne peut élire qu'un musulman » ont scandé des dizaines de milliers de manifestants ignorants. Ahok s'est excusé publiquement. Il a multiplié les gestes d'apaisement, il s'est même rendu dimanche dernier à la mosquée. Les musulmans démocrates le soutiennent, mais comment contenir la hargne des salafistes qui trouvent là le prétexte rêvé pour entamer le processus d'exclusion des minorités de leur citoyenneté. L'Arabie Saoudite qui finance depuis vingt ans à coup de milliards le prosélytisme en Indonésie est sur le point de remporter une victoire éclatante vers l'islamisation radicale du plus peuplé des pays musulmans.

Simultanément, en Afrique du nord, on assiste pareillement à l'occultation du savoir par les hommes des ténèbres.
À Tunis, l'école islamique de la Zitouna est une honorable institution fondée en 737 soit cinq ans après la mort du prophète. C'est la plus vieille université du monde ! Les zitouniens que Bourguiba et Ben Ali avaient quelque peu muselés au siècle dernier se sentent depuis la révolution de 2011, investis du devoir de vérité et de tolérance que leur ancestrale école leur a enseigné. En libérant la Tunisie, le peuple a aussi libéré la Zitouna. C'est sans doute pourquoi lors du dernier remaniement politique, son recteur Monsieur Abdeljalil Ben Salem a été nommé Ministre des affaires religieuses. Le choix était judicieux car il consacrait un théologien respecté pour son érudition, son indépendance et sa liberté d'expression. Très vite, il s'est fait remarquer en déclarant dans un quotidien égyptien « l'extrémisme et le fanatisme ont envahi le monde arabe... nous avons besoin de nous arrêter sur ses causes, ses origines et la manière dont on doit traiter ce phénomène...le fondamentalisme et le terrorisme se nourrit des crises économiques tout comme jadis le fascisme et le nazisme ». Les saoudiens qui revendiquent le monopole du dogme se sont sentis obligés de dépêcher à Tunis une délégation chargée de recadrer l'impertinent. La rencontre fut houleuse. On imagine que l'ambassadeur saoudien outré exigea pour le moins que le repenti à genoux lui baisa la jellaba. Que nenni, rien, oualou. Alors, le plénipotentiaire se précipita chez le Président et le Chef du gouvernement pour exiger l'enfermement du dément. Trop tard, entre temps le téméraire ministre zitounien courrait rendre compte à la représentation nationale qui en séance, applaudissait ses propos : « oui, je dénonce  l'influence néfaste du wahhabisme saoudien en tant que vecteur du terrorisme.... je leur ai dit avec  humilité et affection  : réformez votre école car le terrorisme vient de là ! »
Passé quasiment inaperçu en France, la portée de cet événement est pourtant inouïe ! C'est la première fois que pareille vérité est révélée dans une assemblée musulmane. Jamais auparavant, aucun homme politique arabe n'avait osé proclamer ce que tous les musulmans sensés chuchotent. Immédiatement, les chancelleries ont relayé le coup de tonnerre. Le roi Salman d'Arabie est entré en fureur. L'Etat tunisien a vacillé. En moins de temps qu'il en faut pour l'annoncer, le ministre était limogé.
Si demain, François Fillon devenait Président, Tunis seraient bien inspiré de nommer Abdeljellil Ben Salem ambassadeur à Paris !


jeudi 17 novembre 2016

Malek Chebel le musulman


Le ténèbres ont eu raison de l'homme des lumières ; il s'est éteint la semaine dernière.
Il était tout en douceur, tout en rondeur. S'était-il de sa vie jamais mis en colère ? La voix était douce, presque monocorde, ses yeux pétillants buvaient les paroles des incultes et des érudits avec la même empathie. Il avait la foi. Sa religion était celle de l'abandon, de la confiance, de la paix: Islam.

Né au milieu du siècle dans l'est algérien, l'infatigable dévoreur de savoir monte à Paris à l'âge de 27 ans où il enchaîne les doctorats. Pas moins de trois : psychanalyse, anthropologie, sciences politiques. Pour autant, l'université française n'en fera pas un mandarin. Ses livres se vendent bien car les éditeurs ont flairé le bon client. Malek accepte tous les plans communication : « Islam pour les Nuls » « Dictionnaire amoureux de l'Islam » l'érotisme, le kama soutra, Shéhérazade, sexe, homosexualité, désir... l'Islam à toutes les sauces ! Pourquoi pas ? L'intellectuel sait que pour faire passer son message, pour gagner le grand public, il faut accéder aux têtes de gondoles dans les librairies d'Auchan et de la FNAC. Avant tout le monde, il avait compris que la fracture qui s'annonçait appelait d'urgence la conversion des Français à la perception de l'Islam de la paix et que les musulmans se retrouvent dans une pensée d'incommensurable tolérance. Professer « l'Islam des Lumières », c'est éclairer les ignorants. Alors, il dédicaçait à tour de bras dans les librairies de province, il colloquait inlassablement avec des pasteurs, des rabbins, des abbés, des mécréants et des libres penseurs. Pour les musulmans de France, mais pas seulement, il était la présence rassurante à portée d'étagère, la sagesse de l'ancien qui calmait la fougue de l'ignorance sur les écrans de télévision.

Musulman, arabe, algérien authentiquement ; acceptant l'honneur de la plus haute décoration française, il refusa la nationalité que lui proposèrent deux Présidents de la République. Il a été inhumé à Skikda parmi les siens. Simultanément, à Puteaux en banlieue parisienne, ses voisins, ses amis, des personnalités mêlées aux anonymes, étaient venus par centaines dans la grande salle de la mairie pour lui rendre un dernier hommage. Sous les portraits géants du savant souriant, devant un pupitre sonorisé, les représentants de la France plurielle sont venus dire combien Malek Chebel était grand.

Il était musulman. Allah yarhamouhou.

samedi 5 novembre 2016

Vers une délocalisation de la Salpêtrière au Liban ?

Dans les pays arabes la médecine française a la réputation d'être la meilleure du monde De toutes les anciennes colonies affluent les souffrances que la France savante et généreuse sait apaiser. Mais cette notoriété est en train de s'éclipser au point qu'il y a deux mois, apprenant que Chirac avait été hospitalisé à Paris, ses amis libanais le déclarèrent en grand danger et ils proposèrent à Bernadette de le faire soigner à Beyrouth. Cette petite blague est nourrie par l'histoire d'une contre performance médicale française que se relatent les Libanais.

Elle met en cause la Salpêtrière, centre hospitalier et universitaire parisien - 1 600 lits, 8 000 soignants dont 1 300 médecins -, qui accueille plus d'un demi million de patients chaque année. Ce pôle d'excellence de l'assistance publique a d'un seul coup perdu ses trois étoiles au guide médical du Levant.
Que s'est-il passé ?

L'été dernier, Georges, modeste entrepreneur franco libanais se présente en titubant aux urgences. Il en est très vite congédié avec une ordonnance d'aspirine. Quelques jours plus tard, sur l'insistance de son médecin traitant, il parvient à se faire hospitaliser. Analyses et explorations révèlent des nodules cancéreux dans l'abdomen. Faut-il opérer ? La question s'est sans doute posée. Las, on est au mois d'août, les équipes sont réduites, la plupart des chirurgiens sont en vacances.  Ceux qui restent doivent faire le choix du plus urgent, du moins coûteux, du mieux vivant, du plus jeune, du plus facile... Chacun sait qu'il est malchanceux d'être hospitalisé le week end ou pendant les vacances. Ces périodes de sous effectifs et de surcharge de travail correspondent à une surmortalité. Aucune étude ne l'a prouvé car aucune étude n'a jamais été publiée.
Georges avec de la chance, pourra t-il survivre jusqu'à septembre ? Le diagnostic est mauvais. Pour le soulager on lui pose un drain, on lui propose des calmants que par bravade il refuse d'abord avant de s'y résoudre. La morphine le plonge alors dans un univers cotonneux.

Hier c'était un géant, une force de la nature, hyperactif, débonnaire, toujours souriant. Que vont devenir ses jeunes enfants ? Le voici vaincu, amaigri, déjà cadavérique, les joues creuses, le regard ailleurs. Dans ses instants de lucidité il murmure à l'oreille de ses amis « je suis foutu, ne reste pas là, rentre chez toi... » Nous sommes le quinze août. Dans ce gigantesque hôpital qui paraît suspendu au retour des vacanciers, les couloirs sont vides mais la chambre de Georges ne désemplit pas. L'agonisant est veillé jour et nuit. Dans la salle d'attente, on discute comme si de rien n'était. L'optimisme libanais est de rigueur, il va vivre, c'est évident. Nul ne songe à se résigner. Ce serait tenter le mauvais sort dans ces lieux où le diable rôde. Les amis discrètement prient dans toutes les langues de leurs religions, chacun selon ses rites, ses traditions, ses superstitions : chiites, sunnites, alaouites, chaldéens, syriaques, arméniens, grecs, juifs, orthodoxes, incroyants...C'est la tour de Babel des suppliques silencieuses.
Chaque jour, des quatre coins du monde il en arrive des nouveaux, d'Australie, d'Abu Dhabi, de Dakar, de Valparéso...Ceux qui ne peuvent pas venir téléphonent tout le temps. On leur répond sans faillir, que Georges va beaucoup mieux, que le remède « expérimental » donne des résultats probants... On ment comme des arracheurs de dents. Personne ne nous croit mais chacun espère le miracle.
Les infirmières et les autres patients s'interrogent sur la cause de cette agitation. Georges est-il le chef d'un parti politique influent ou d'une secte mystérieuse ? Le Président d'une multinationale ou celui d'un pays lointain ?
Rien de tout cela. C'est seulement le héros anonyme connu de ses seuls compagnons d'armes. Il était le chef charismatique d'une centaine de lycéens. Mais qui se souvient de la guerre du Liban ? Elle dura 15 ans fit 250 000 morts ! En proportion, imaginez la France avec 3 ou 4 millions de tués. Qui se rappelle des exploits de ces adolescents résistants de la première heure, en 1975 ? 
Eux. Les survivants. Il sont venus, ils sont tous là. Mais pas question d'évoquer le passé ni même de se lamenter. Ces presque quinquagénaires sont restés des combattants. A t-on essayé tous les remèdes ? Chacun interroge les médecins, les infirmières de passage. Puis en réunion la troupe confronte les réponses.
C'est le monde à l'envers : au fatalisme médical français répond la logique et le pragmatisme oriental, au défaitisme occidental s'oppose l'optimisme libanais. Le malade est condamné disent les blouses blanches, c'est une question d'heures, au mieux de quelques jours. Mais vous n'avez rien tenté s'indignent les amis de Georges !

À Beyrouth, quelques sommités médicales alertées planchent sur le cas du moribond. L'espoir est mince. C'est suffisant. Yallah ! Les amis se cotisent : les riches abondent, les pauvres sont dispensés. En toute hâte, un transfert est organisé. La décharge de responsabilité est signée. Le mourant quitte l'hôpital direction l'aéroport du Bourget. Quatre heures plus tard, dans la nuit, un avion sanitaire se pose à Beyrouth. Cent personnes escortent l'ambulance jusqu'à l'hôpital  un bloc opératoire a été préparé. Deux chirurgiens se penchent pendant six heures. Ils extirpent les boules de mort du corps inanimé.


Les mois ont passés. Le miraculé se porte bien. Le Liban tout entier est secoué de fierté. Dans quelques jours, Georges sera de retour à Paris où ses amis lui ont préparé un banquet pour célébrer la victoire des opiniâtres sur les résignés.